Créer une société de production audiovisuelle
Sébastien Lachaussée et Elisa Martin-Winkel

Sébastien Lachaussée et Elisa Martin-Winkel

Créer une société de production audiovisuelle

La création d’une société de production suppose de réfléchir aux conditions dans lesquelles cette activité va naitre : il s’agit de choisir ses partenaires, la structure de la société, financer la création de la société et son activité, s’interroger le cas échéant aux incompatibilités avec le régime de l’intermittence …

CHOIX DE LA STRUCTURE

Une fois vos futurs associés choisis, se pose la question du choix de la structure juridique de votre société. Le plus généralement il s’agira d’opter pour une société par actions simplifiée (SAS) ou pour une société à responsabilité (SARL).

Parmi les différences entre les deux formes de société on peut noter que :

•une SARL peut avoir un ou plusieurs gérant alors que la SAS a obligatoirement un président et éventuellement un directeur général, un comité, conseil d’administration…
•le statut du dirigeant de SARL est TNS en cas de gérance majoritaire et assimilé salarié dans les autres cas, le président de SAS est assimilé salarié
•les cessions de parts de SARL aux tiers font obligatoirement l’objet d’un agrément alors que cela doit être spécialement prévu par les statuts des SAS
•les conditions de votes aux Assemblées générales ordinaires et extraordinaires sont légalement déterminées pour les SARL mais relèvent des statuts pour les SAS

Le choix dépendra notamment des circonstances de la création, de l’équilibre entre associés, des activités de chaque associé, l’étude de ces éléments permettra à un professionnel avisé de vous conseiller la structure la plus adaptée, et qui sera fiscalement la plus avantageuse.

MONTANT ET FORME DU CAPITAL

S’agissant du montant et de la forme du capital, il est important de signaler que les apports en nature (matériel, droits d’auteurs…) doivent être intégralement libérés immédiatement et remis à la société. Par ailleurs, si les apports en industrie sont possibles, ils ne sont pas constitutifs du capital mais rémunérés par l’attribution de parts spécifiques.

En tout état de cause, il est judicieux de préférer des apports en numéraire, libérés ou non libérés, qui permettront le financement des activités de la société, et seront plus simple à manier. Il est entendu que légalement une portion minimale doit être libérée au moment de la souscription   :

•pour les SARL : un cinquième du montant à la souscription et le reste en une ou plusieurs fois dans un délai maximum de cinq ans à compter de l’immatriculation de la société au RCS ;
•pour les SAS : la moitié du montant à la souscription et le reste en une ou plusieurs fois dans un délai maximum de cinq ans à compter de l’immatriculation de la société au RCS ;

Par ailleurs, l’article 211-3 – 3°du Règlement Général des Aides Financières du Centre National du Cinéma et de l’Image Animée  prévoit que « Pour être admises au bénéfice des aides financières à la production et à la préparation, les entreprises de production répondent aux conditions suivantes : (…)  Etre constituées sous forme de société commerciale avec un capital social d’un montant minimum de 45 000 € et comprenant une part minimale en numéraire entièrement libérée de 22 500 €, lorsque leur siège social est situé en France » , étant précisé que le CNC vérifie cette condition à l’agrément des investissements ou à l’agrément de production.

Aussi, si le montant du capital d’une société de production peut être librement choisi et augmenter de manière progressive, il doit atteindre 45 000 € dont 22 500 € en numéraire libérés au plus tard pour la demande de l’agrément de production et de préférence préalablement au dépôt de demande d’une aide.

On notera également que la valeur nominale des parts doit être déterminée dans l’optique de faciliter les opérations de capital futures, aussi privilégiez des valeurs tel que 1, 10 ou 100 euros, qui sont facilement divisibles.

GERANCE DE LA SOCIETE ET INTERMITTENCE

La perception de l’Aide au retour à l’emploi (allocation-chômage) suppose d’être à la recherche effective et permanente d’un emploi ». L’exercice d’un mandat de gérance ou de présidence, même non rémunéré, suppose un investissement temporel plus ou moins important, qui peut donc être contraire à la condition de recherche active d’un emploi. Pour savoir si un dirigeant ou un gérant de société est en mesure de rechercher activement un emploi l’Unedic indique qu’il convient de déterminer si sa société exerce une activité ou est en sommeil et s’il effectue lui-même des actes positifs et répétés de recherche d’emploi (Circulaire Unédic n° 2014-26 du 30 septembre 2014, Annexe 7, p. 110). Il semblerait cependant que depuis peu l’administration accepte le cumul gérance non rémunérée et intermittence du spectacle si les cachets ne sont pas réalisés avec la société dont on est le gérant, et qu’un courrier est envoyé au pole emploi spectacle dans lequel le gérant s’engage à ne pas percevoir de rémunération. A notre avis, il reste déconseillé de réaliser ce cumul, l’administration ayant tendance à modifier sa position sur cette question, et il n’est pas certain que cette situation soit pérenne.

Par ailleurs, si le contrat de travail est conclu avec la société dont le salarié est associé, il convient d’interroger préalablement Pôle emploi sur la possibilité pour le salarier de bénéficier des avantages sociaux de l’assurance chômage en raison du cumul emploi salarié – exercice d’un mandat social. En effet, si l’administration considère que le contrat de travail répond aux conditions d’indépendance vis-à-vis du mandat social, le salarié pourra être bénéficiaire de l’assurance chômage, dans le cas contraire, il pourra être demandé à l’administration de ne pas payer les charges sociales relatives à l’assurance chômage. Une procédure standardisée d’interrogation préalable est prévue, qui engage l’administration. Il est donc recommandé de l’utiliser si vous êtes dans ce cas de figure, et de vous faire accompagner au besoin par un professionnel.

Notons que, lors de la demande d’allocations de perte d’emploi, l’intermittent devra informer Pôle emploi de l’existence de son statut de dirigeant de société, ce qui entraînera à chaque demande un possible un examen complémentaire du dossier et une nouvelle possibilité de remise en cause.

Même si l’intermittent n’est que simple gérant minoritaire de SARL ou président de SAS sans rémunération, il reste essentiel de disposer de documents qui attestent de la réalité du contrat de travail et de l’absence de pouvoirs de l’associé dans la société pour atténuer tout risque de demande de requalification a posteriori du contrat de travail en contrat d’entreprise par Pôle emploi.

FINANCER LA CREATION DE LA SOCIETE ET LE DEVELOPPEMENT

En premier lieu, il faut noter que le CNC propose des aides par projet, notamment des aides à l’écriture. Le CNC ne propose en revanche pas d’aide dans le cadre de la création et du développement des sociétés de production.

L’aide aux demandeurs d’emploi créant ou reprenant une entreprise (ACCRE) peut se révéler intéressante dans le cadre de la création d’une société qui offre aux personnes éligibles une exonération des charges sociales. Sont notamment éligibles les demandeurs d’emploi indemnisés ou susceptibles de l’être, les bénéficiaires du RSA ou les personnes de moins de 26 ans qui créent une société et en assure le contrôle. Il est important de noter que depuis le 1er janvier 2017, l’aide est réservée aux personnes dont les revenus d’activité sont inférieurs au plafond annuel de la sécurité sociale (soit 39 228 €) en 2017 et est dégressive.

Il est évidemment possible de solliciter des prêts bancaires. Le cas échéant, il sera judicieux de se tourner vers des banques spécialisées dans le domaine de la production cinématographique et audiovisuelle (natixis-coficiné, neuflize OBC…). Celle-ci ne sont cependant généralement réceptives qu’au demandes émanant de société ayant au moins un long-métrage à un stade avancé de développement ou d’autres projets audiovisuels permettant de justifier d’un certain chiffre d’affaire. Les producteurs peuvent également se rapprocher de l’IFCIC qui a notamment pour mission de faciliter l’accès au financement bancaire pour les entreprises des industries culturelles.

Les producteurs peuvent demander le support des Sofica afin de permettre le développement de leurs activités. En effet, si la plus grande part des investissements des Sofica

porte sur des projets précis, et en complément de financements acquis, ces dernières contribuent également sous la forme de crédits de développements et de souscription au capital de sociétés de réalisation.

En 2016, 24 % de l’investissement des Sofica a été fait sous forme de souscription au capital de sociétés de réalisation, dont 81,6 % destinés au financement du développement d’œuvres cinématographiques et 18,4 % au financement du développement d’œuvres audiovisuelles. On doit cependant noter ici que l’intérêt des Sofica se portera en très grande majorité sur des sociétés avec lesquelles elles ont déjà collaboré dans le cadre du financement de la production d’un film.

Enfin, afin de financer le développement d’une société, le dispositif TEPA ISF permet aux PME de solliciter des particuliers en leur proposant un investissement ouvrant droit à un avantage fiscal. Le dispositif suppose néanmoins l’octroi de titres aux souscripteurs et il faut veiller à ce qu’il n’y ait pas de perte de contrôle de la société, et à conserver un équilibre sain entre associés actifs et associés passifs. Il est également possible de solliciter le soutien de fonds Tepa, notamment ceux spécialisés en matière de cinéma, ceux ci investissent cependant plutôt sur des projets développés.

La création d’une société est une étape délicate et primordiale, il est alors judicieux de se faire accompagner par un avocat spécialisé qui pourra vous conseiller et trouver la solution la plus adaptée à l’activité que vous souhaitez développer.

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